Iran

 

Période : Du 6 avril au 17 avril 2001

Organisation : circuit autotour, hôtels réservés et voiture avec chauffeur.

Parcours : Téhéran, Shiraz, Kerman, Bam, Yadz, Ispahan, Téheran

Transport : Iran air pour Paris / Téhéran aller-retour, vol intérieur Iran air pour Téhéran / Shiraz 

Carte et parcours : cliquez sur le globe

 

L’Iran s’ouvre.

  La rumeur s’amplifie dans le monde du voyage. Commencée depuis quelques années, cette ouverture trouve son écho dans les agences de voyages et en cette année 2001, nombreux sont les voyageurs qui ont déjà repris le chemin de ce pays. Bien sûr, c’est une destination qui inquiète encore un peu. Son passé récent est suffisamment sulfureux pour motiver quelques craintes à son égard : la révolution islamique de 1979, la prise d’otages à l’ambassade américaine, la terrible guerre contre l’Irak, l’image récurrente du mollah barbu et de la femme en tchador, le livre de Betty Mamoudhi ‘jamais sans ma fille’ ont profondément brouillé l’image de ce pays. Tous ces clichés ne sont d’ailleurs pas dénués de fondement et il n’est pas dit que la stabilisation de la situation de ce pays et sa politique d’ouverture envers les étrangers soit définitivement garantie.

Mais, en tout état de cause, entreprendre un voyage en Iran aujourd’hui permet de faire la peau à un nombre considérable de fausses idées, de découvrir un magnifique pays, au patrimoine historique inestimable et aux somptueux paysages, et d’approcher le peuple iranien, dont la réputation d’hospitalité et de cordialité est tout à fait justifiée.

Ce voyage me tentait déjà depuis de nombreux mois. Les raisons en étaient un peu obscures car je n’avais en fait pas grande idée de ce que je pouvais y trouver. Je n’avais même pas conscience de la magnificence des mosquées d’Ispahan, qui, à elles seules, justifient le séjour dans le pays. J’étais simplement attiré par la nouveauté d’une destination encore peu prisée, argument assez peu glorieux finalement. Un autre facteur déclenchant fut également mon attrait pour le cinéma iranien, dont je suis extrêmement friand (sans en être un spécialiste !) : un cinéma assez contemplatif, certes, un peu ‘difficile’, mais qui trouve un écho certain en moi.

Me restait donc à trouver la solution et le temps pour m’y rendre : je n’avais, à ce sujet, pas beaucoup d’alternatives. Il est possible de visiter ce pays en voyage organisé, bien sûr, c’est encore la méthode la plus couramment utilisée, mais également en individuel. Il faut savoir qu’avant la révolution de 1979, le tourisme individuel était monnaie courante. L’Iran était un pays relativement ouvert et les contraintes que l’on rencontre aujourd’hui n’existaient que dans une moindre mesure. Voyager en individuel en Iran, à l’heure actuelle, est relativement simple, si l’on a obtenu son visa. De nombreux carnets de voyageurs en témoignent sur le Net. Le guide Lonely Planet (qui mérite maintenant d’être réactualisé - 1998) et les tuyaux des voyageurs permettent de trouver les solutions pour ce déplacer et se loger à moindre coût, comme dans de nombreux autres pays beaucoup plus ouverts au tourisme.

Pour mon cas personnel, disposant de moins de deux semaines, entreprendre un voyage sans organisation préalable m’aurait fait sans doute perdre un temps déjà compté. Or, ce pays est vaste, et un bon mois est sans doute nécessaire pour avoir une approche complète du pays. Je savais dès le départ que mon périple présenterait des lacunes, justification d’un voyage ultérieur ?!

Il était cependant hors de question pour moi de partir en circuit organisé classique, en groupe, mode de voyage que je ne supporte guère. J’ai donc trouvé une alternative dans mon agence de voyage favorite, qui me permettait de disposer d’une voiture (avec chauffeur, puisque c’est obligatoire) et des réservations d’hôtel, m’affranchissant ainsi de toute organisation, et me laissant en grande partie l’autonomie et la liberté du voyage individuel. Tout ceci peut paraître bien luxueux, et l’addition est bien sûr beaucoup plus salée que pour le voyageur individuel. J’aurai dépensé 1700 euros pour 12 jours, tout compris, sachant que j’ai dormi dans des hôtels de type trois étoiles et que j’ai roulé 2500 km avec un chauffeur, en Mercedes 220 s’il vous plait ! Ceci est finalement très proche des tarifs des voyage de groupe, la liberté en plus. Je vais revenir ultérieurement plus en détail sur le coût de la vie en Iran.

Partir en Iran nécessite un visa. Pour mon cas, le problème fut résolu par l’agence de voyage, qui s’en occupa. Obtenir un visa en individuel est un peu long mais tout à fait possible. Visa touristique valable trois mois, le passeport devant être encore valide six mois après la date d’émission et pas de visa israélien. On peut l’obtenir par l’intermédiaire d’agences spécialisées, ce qui évite déplacement et perte de temps, moyennant commission, bien sûr.

Avant de commencer le récit de mon voyage, au jour le jour, je vous livre quelques réflexions thématiques sur ce pays, fruit de ma petite expérience et de mes rencontres avec les Iraniens.

Les conditions d’un voyage en Iran :

On peut dire que l’Iran est un pays en bonne voie de développement, bien que je n’aime pas utiliser ce vocable, car il recouvre de nombreuses caractéristiques subjectives. L’état sanitaire du pays est bon, ainsi que les infrastructures nécessaires à l’accueil des touristes que nous sommes. Vous ne rencontrerez pas de problème pour vous loger d’une manière décente, à vous transporter ou à vous restaurer, ce qui est l’essentiel des contraintes du voyage. Il y en a pour tous les budgets.

Les hôtels : 

Mes références sont limitées puisque mes hôtels étaient réservés à l’avance. J’ai dormi dans des hôtels de type trois étoiles local (parfois un peu fatigué) mais dans l’ensemble tout à fait honorables. Il existe des hôtels luxueux dans les grandes villes et pour les petits budgets, on trouve des guesthouses au confort sommaire mais bon marché (voir Lonely Planet et autres carnets de voyages).

Les restaurants : 

Le budget alimentation ne grèvera pas votre budget global : se nourrir en Iran est très bon marché pour les européens. Un repas dans un restaurant en ville correct (un plat principal accompagné de deux autres petits plats et une boisson) vous reviendra à 3 euros environ. Un repas plus léger (hamburger ou pizza ou sandwich avec une boisson), bien suffisant par exemple pour le midi, vous reviendra à un euro, parfois moins.

Les transports :

La aussi, mon expérience est limitée à mon mode de déplacement en voiture de location mais le pays semble bien irrigué par un réseau de bus et de taxis collectifs, aux prix assez dérisoires. La solution de l’avion, pour les vols intérieurs, est également à envisager. Les distances sont longues et les prix restent tout à fait en dessous des tarifs européens.

Les précautions en matière d’hygiène : 

L’Iran est un pays très propre , aux conditions d’hygiène satisfaisantes. Pas de vaccinations particulières, hormis les habituelles précautions (TP, typhoïde, hépatite A et B). On parle de paludisme dans le sud en été en zone rurale. J’ai pris le risque de ne pas prendre de traitement, restant en ville et ne voyageant pas dans cette zone. Il vous faut cependant vous renseigner à ce sujet et juger par vous même. Trousse à pharmacie habituelle à emporter (antibiotique large spectre, anti-inflammatoire, médicaments pour les intestins, désinfectant et pansements, produits anti-moustiques tropicaux, crème solaire…). On trouve facilement des médicaments courants au marché noir (c’est à dire dans la rue !). Il y a nombreuses plaques de médecins spécialisés dans les grandes villes. Bien sûr, en cas de gros pépin, contacter votre assistance. L’eau du robinet est potable dans les grandes villes, j’en ai bu assez souvent. Par précaution, on trouve de l’eau minérale en bouteille assez facilement maintenant. Pour la nourriture, préférez bien sûr les aliments cuits, mais on peut consommer des salades dans les grandes villes, puisque lavées à l’eau potable. Bien entendu, plus vous prendrez de précautions par rapport à l’eau et à la nourriture, moins les risques de dérangements intestinaux ou autres seront grands. En Iran, à la différence de nombreux autres pays de la région, on peut être, me semble-t-il, plus souple, mais appliquez malgré tout la règle qui vous semble la plus adaptée !

L’argent :

L’unité monétaire est le rial (accessoirement le toman, qui équivaut à 10 rials). Le cours actuel est le suivant (avril 2001) :

Vous pouvez changer à la banque Melli, dès l’aéroport, qui prendra vos devises à un taux normal. Dans les villes, vous avez des bureaux de change, plus rapides que les banques sans doute. Evitez le marché noir, c’est à dire les changeurs dans la rue : les taux seront à peine plus avantageux et il y a toujours des risques (billets abîmés, démonétisés, ou pas le compte…)

Le budget ‘sites et musées’ : 

Il s’agit là d’une mauvaise surprise du voyage : le gouvernement a choisi de favoriser le tourisme mais il le fait payer. Le budget sera conséquent ; je pense avoir dépensé pas loin de 80 euros pour l’ensemble de mes visites. Vous payez souvent un droit d’entrée de 15.000, 20.000 ou 25.000 rials (2 à 3 euros). Le musée archéologique de Téhéran détient le record : 60.000 rials (avec le musée islamique)

Le coût de la vie en Iran :

Le niveau de vie en Iran n’est tout de même pas florissant. Il se caractérise par de fortes inégalités, comme dans de nombreux pays en voie de développement. 20 % de la population peut être considérée comme riche, voir très riche. 60 % de la population vit avec un salaire moyen de 100 dollars par mois et 20 % de la population vit en dessous du seuil de pauvreté (nomades…). 100 dollars par mois est un salaire qui permet de survivre, de quoi se nourrir et se loger. Un professeur gagne même moins. Par exemple, j’ai rencontré un professeur d’anglais, qui est payé 1 dollar par heure de cours.

Voici une échelle des prix que j’ai pu constituer : on remarque que le coût des denrées essentielles est faible, mais que tout ce qui est produit manufacturé devient vite inaccessible à la majorité.

La place de la voiture en Iran et la circulation :

Les Iraniens conduisent n’importe comment, dans la bonne humeur et avec la bénédiction du prophète. Objectivement, il s’agit d’un pays dangereux en matière de conduite automobile. Priorités, clignotants, rétroviseurs sont des concepts non acquis pour les Iraniens. Les passages piétons et les feus tricolores, lorsqu’ils existent, semblent plutôt avoir une vocation ornementale. En ville, la cohabitation entre piétons et véhicules est un savant dosage d’anticipation réciproque. Comme les automobiles ne respectent pas les piétons, ceux-ci traversent les chaussées comme ils peuvent, au milieu du flot. Généralement, cela passe (à quelques centimètres…) mais les accidents sont courants : j’ai vu un pauvre petit papi, à la mobilité réduite, se faire renverser par une moto. Pour nous, occidentaux, l’exercice qui consiste à traverser une artère encombrée est extrêmement stressant et périlleux. On s’y habitue par nécessité. Lorsqu’une artère est à sens unique, il ne faut surtout pas négliger de regarder dans les deux sens, car beaucoup de motos roulent à contre sens.

Les villes sont très encombrées, particulièrement Téhéran, qui subit des embouteillages monstres tous les jours. Malgré un fort développement de rocades, de périphériques, de voies expresses, cela ne suffit pas à améliorer la situation, les iraniens étant très attachés à l’automobile.

Pour le réseau routier dans le pays, on peut le juger comme satisfaisant. Les grandes routes sont dans l’ensemble de bonne qualité, voir excellentes. Il s’agit même parfois d’autoroutes, ce qui réduit les risques en cas de dépassement. Elles sont cependant beaucoup moins sécurisées que dans nos pays : On peut parfois croiser un troupeau de moutons….Sur les grandes routes, circulent presque exclusivement des camions et des bus. Les règles essentielles de sécurité de conduite n’étant pas respectées et comme il est possible de rouler vite, les routes sont également très dangereuses. J’ai vu quelques carcasses de camions dont l’état laissait supposer des violences de choc inouïes. Rouler la nuit est à la limite du suicidaire.

Le parc automobile iranien est composé pour moitié du modèle national qui est la Paykan. Il s’agit d’une automobile à la technologie et au design datant de la fin des années 60, légèrement re stylée au cours des années. Elle existe en berline, en break, en pick-up (ce modèle n’est pas disponible en cabriolet…). Modèle à la fiabilité moyenne, il est vendu 6000 dollars.

 

Pour les autres voitures, on trouve principalement les Coréens (Daewoo et Kia) et les Français avec Peugeot. Peugeot a vendu ses chaînes de 405 et ce modèle est maintenant extrêmement répandu (prix : 12.000 dollars). On trouve également quelques oiseaux exotiques, comme la Citroën Dyane, appelée ici « Jyane » (flèche), souvent en piteux état (car plus produite depuis longtemps) et déclinée dans des couleurs très guimauve. Enfin, quelques modèles allemands (Mercedes, BMW) et des américaines assez anciennes.

La situation sociale en Iran :

Ce n’est pas un voyage de 12 jours qui peut permettre de tirer des conclusions définitives sur la situation sociale du pays. J’ai cependant pu glaner un certain nombre d’informations caractéristiques d’un instantané :

L’Iran est une République Islamique et même si l’arrivée de Khatami au pouvoir comme président a permis de détendre un peu les strictes règles de conduite qui s’appliquent aux Iraniens et aux étrangers, il n’est pas question de les transgresser outrageusement.

Pour l’étranger, la contrainte importante se trouve bien sûr au niveau de l’aspect vestimentaire, particulièrement pour les femmes. Les hommes peuvent se satisfaire d’une tenue courante (chemise ou chemisette, pantalon, pas de short). Les femmes devront se couvrir systématiquement d’un foulard. Il est possible maintenant d’avoir une tenue plus légère (pantalon ample, chemise longue). Le port du tchador ou de l’imperméable n’est pas impératif. Sur Iran Air, les femmes peuvent avoir les cheveux libres. Il y a donc une réelle avancée dans ce domaine, si l’on peut dire... En tout état de cause, il est inutile de provoquer par des tenues non conformes, au risque de subir les regards courroucés et de ressentir un malaise.

Pour les Iraniens, et plus particulièrement les femmes, la tenue de rigueur reste à 80% le tchador noir. Les villes sont un peu plus libres que les campagnes. A Téhéran, on peut voir des jeunes couples se tenant la main dans les parcs, des femmes au maquillage prononcé, la mèche rebelle, et fumant à la table d’un restaurant. Ceci semblait assez inconcevable il y a quelques temps.

D’une manière générale, de par les différentes rencontres que j’ai pu avoir, il semble qu’un malaise assez profond règne dans la population, lié à de multiples frustrations. Il est vrai que j’ai eu des discussions avec des Iraniens parlant anglais (plutôt étudiants), donc non représentatifs de l’ensemble de la population. J’ai noté plusieurs constantes dans toutes les conversations :

Une question récurrente fut « comment partir travailler à l’étranger, quel travail y faire ?». Question assez candide et à laquelle il m’était bien impossible d’apporter une réponse. Si les pays européens et l’Amérique du Nord peuvent sembler être un Eldorado, comment expliquer que s’y faire une place, au cas où ils aient la possibilité de quitter l’Iran, requiert de maîtriser la langue et d’avoir un bon bagage de compétences.

Dans les conversations, on ressent également une grande frustration par rapport aux ‘interdits’ de la république islamique, principalement l’alcool et les femmes (j’ai eu principalement des conversations avec des hommes, bien sûr !). L’alcool semble assez largement consommé en privé, avec un marché noir important. Quant au sexe, les chaînes étrangères captées par satellites apportent les images interdites. Je n’ai pas pu exactement appréhender les problèmes liés à la drogue mais il est certain que ce pays souffre aussi de cet avatar.

Un malaise profond entretenu aussi par une situation économique difficile. L’inflation est importante et les prix des denrées essentielles augmentent rapidement, plus vite en tout cas que les salaires. On m’a dit une fois « avant (la révolution ?), le travail d’un homme nourrissait six personnes, maintenant, il faut le travail de six personnes pour nourrir un homme… ».

La position de la femme dans la société iranienne :

 

La situation est beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît. A la différence d’autres pays musulmans de la région, la femme m’a semblé moins en retrait dans la société civile et la vie de tout les jours. Certes, le tchador est la manifestation la plus visible de son statut particulier. Mais la femme iranienne (citadine) peut travailler, n’est pas cloîtrée chez elle, conduit, se maquille, s’habille à l’européenne sous le tchador….

De là à dire qu’elle est l’égale de l’homme… Il me semble qu’en fait, il existe un très fort poids des traditions qui font que, tant qu’elle reste à sa place (en statut de soumission et de discrétion), elle n’a pas de problème. Dans le cas contraire… Mais il ne faut pas rapprocher la situation de la femme en Iran et en Afghanistan, où là, la situation est terriblement dramatique (une véritable régression de l’humanité).

Je le répète encore une fois, toutes ces remarques ne sont que le fruit de ma maigre expérience et ne reflètent peut être pas la complète réalité. Mais passons à mon récit :

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