Indonésie
Bali et Java

 

Samedi 5 août et dimanche 6 août 2000 : envol vers Denpasar et première journée à Kuta.

Nous quittons Paris pour Orly en taxi à 7h00. Le vol pour Francfort est à 10h30. Pas de retard, de toute manière, nous avons du temps pour la correspondance, plus de trois heures. L'aéroport de Francfort n'est pas très agréable : nous devons déjà trouver le comptoir Garuda Indonesia pour obtenir nos cartes d'enregistrement, ce qui est rapidement fait, puis nous déambulons dans les couloirs et hall, sans boutique et salle d'attente digne de ce nom. Vers 16h00, nous embarquons sur le 747 de Garuda, destination Bangkok. Une bonne dizaine d'heures de vol. L'avion est plein, beaucoup d'Italiens. Nous voisins transalpins, depuis quelques années, voyagent de plus en plus. Généralement, on les remarque au bruit et aux lunettes de soleil, qu'ils gardent systématiquement, même dans la pénombre (je plaisante !). Garuda propose un service honorable et n'a pas à rougir de nombreuses compagnies européennes. Petite particularité au décollage, que je n'avais jamais vécu jusqu'à maintenant sur les autres compagnies que j'ai emprunté ; une caméra placée au devant de l'avion retransmet les images sur les écrans vidéo de la cabine. On se croit donc dans la cabine de pilotage ; cela donne une autre dimension à cet instant qui reste toujours un peu stressant.

Le vol se passe sans encombre. Bien sûr, il faut occuper et faire patienter Armance car c'est un dur périple pour elle. Sibylle prend un léger somnifère et en donnons un pour enfant également à Armance, afin qu'elle dorme bien. Moi, je reste éveillé tout au long du voyage. Arrivé à Bangkok au petit matin. Cela fait déjà presque 20 heures que nous avons quitté notre domicile. Nous restons dans l'avion sur le tarmac une bonne heure. Armance, sonnée sans doute par le somnifère, dort à poings fermés. Décollage pour la dernière étape de quatre heures. L'atterrissage à Denpasar est amusant car la piste commence quasiment sur la plage : on à l'impression que l'on va amerrir. Nous sommes heureux d'arriver. Un tel voyage, le décalage horaire, le manque de sommeil, les attentes, tout ceci est quand même un peu lourd. Police et douane, récupération des bagages, change, tout se passe assez rapidement. Nous sortons de l'aéroport et prenons un ticket à prix fixe pour un taxi qui nous amènera à Kuta. Il fait beau et nous sommes surpris par la température tempérée. Nous nous attendions à quelques chose de beaucoup plus chaud et humide. Kuta se trouve à trois kilomètres de l'aéroport. Nous y avons réservé pour les deux premières nuits du voyage un hôtel (l'Ida Beach Inn ; cité par le routard) depuis la France à l'agence "Voyageurs du monde", où j'ai acheté mes billets d'avion. J'avais peur de galérer avec Armance en cette saison, surtout après les heures d'avion ingurgitées. Cet hôtel était de loin le moins cher de leur catalogue (environ 35 euros) et il s'avérera tout à fait convenable, avec climatisation et piscine, pas beaucoup plus cher que si nous y étions allés directement sans réservation, à mon avis.

Nous prenons nos quartiers dans notre chambre, propre et spacieuse, avec un grand balcon, à l'étage d'un bâtiment sans charme particulier. Je regrette juste de ne pas avoir un des jolis bungalows répartis dans le jardin, avec une petite terrasse devant. Mais nous auront l'occasion de tester cela plus tard. Après avoir repris nos esprits et surtout une bonne douche, nous partons à la découverte de Kuta.

Kuta Beach, ce fut sans doute un petit paradis. Mais cela ne l'est plus vraiment. Kuta fut un des points de ralliement des nombreux hippies qui fréquentèrent la région dans les années 70. C'était un des 3 K (Kaboul, Katmandu, Kuta). Petit village de pêcheur, grande plage, on y fumait allégrement des joints et des champignons hallucinogènes en jouant de la guitare, sans doute. Le paysage a bien changé. Maintenant, c'est une station balnéaire, assez confuse, avec ses hôtels, boutiques, restaurants et bars, et sa circulation intense et polluante. Rajoutons les Mac do, KFC et autres chaînes internationalement connues, cela plante le décor. Des touristes du monde entier s'y retrouvent, particulièrement les jeunes australiens qui viennent chercher ici les vacances à bas prix, le surf et la bière. Bon, tout ceci n'est pas notre tasse de thé mais on s'y sent tout de même mieux que dans ces stations balnéaires hideuses et totalement artificielles que l'on peut trouver par exemple en Espagne et en Turquie. La hauteur des bâtiments est limitée, il subsiste tout de même quelques palmiers qui ont survécu à la frénésie de construction, et la plage, de plusieurs kilomètres de long, est quand même très chouette. La mer, par contre, est réputée dangereuse et les rouleaux impressionnants ne rassurent pas Armance, même s'ils font la joie des surfeurs.

La plage de Kuta

C'est sur la plage que nous nous rendons en premier et c'est là que nous découvrons ce qu'est être harcelé. Partout, et continuellement, des Indonésiens vous proposent des babioles à acheter, ou alors, dans la rue, vous interpellent en criant 'transport ?'. On refuse poliment et avec le sourire au début. On a du mal à garder le sourire à force. Armance sait maintenant très bien dire 'No, thank you'... Après une longue balade sur la plage, nous retournons en ville, pour faire quelques courses.

Nous confirmons au bureau Garuda notre vol du surlendemain puis nous rendons au supermarché local 'Matahari', la chaîne indonésienne que l'on retrouvera dans les autres grandes villes. C'est anecdotique, mais j'aime déambuler dans les magasins à l'étranger, Question de se faire une idée des habitudes alimentaires, vestimentaires, culturelles du pays visité. Le magasin est très occidentalisé et on y retrouve en alimentaire pas mal de noms connus, dont de nombreux produits d'origine française. C'est ça, la mondialisation. Nous nous achetons comme à l'habitude notre bouteille d'alcool local : encore une fois, c'est de l'arack, toujours ce fameux nom que j'ai déjà cité pour plusieurs pays (Turquie, Syrie, Jordanie, Sri Lanka...), même si cela recouvre des boissons totalement différentes. Ici, c'est un peu comme au Sri Lanka, une sorte de whisky, 40 °, bien qu'on en trouvera parfois à 15°, beaucoup plus proche du vin. Avec du coca et des peanuts, cela fera très bien l'affaire pour l'apéritif (et le pousse café !) du soir sur notre balcon, en fumant une kretek. La kretek, c'est la cigarette typiquement indonésienne au clou de girofle. C'est une expérience... La première bouffée est toute sucrée et cela 'arrache' un peu. On s'y est très bien fait. Le premier paquet que j'ai acheté (cela devait être 0.20 euro...) avait douze cigarettes, emballées consciencieusement par quatre, sans filtre, et à mon avis, roulées à la main. Cela faisait un peu pétard ! J'ai acheté des kretek filtre ensuite. Beaucoup plus smart de fumer le clou de girofle avec un filtre...

Nous retournons ensuite à l'hôtel pour se reposer et partons dans la ville à la recherche d'un restaurant cité par le guide du routard (le Dayu 1). Petite terrasse en retrait de la rue ; on y mange bien, du poisson particulièrement. Retour ensuite à l'hôtel, petit verre arack sur le balcon et tout le monde au dodo. Nous ne dormirons malheureusement pas très bien, sous le coup du décalage horaire.

Lundi 7 août 2000 : les lézards à Kuta.

La journée sera consacrée... au repos. On est quand même un peu venu pour se reposer de notre dure vie parisienne. Nous nous consacrerons donc à la plage et au lèche vitrine, sans rien acheter pour l'instant d'ailleurs. Nous n'allons pas nous charger dès maintenant. Et puis, nous n'avons que deux sacs à dos pour les trois, la place est comptée. Le soir, nous allons dîner dans un autre restaurant, visiblement assez réputé, le Poppies. Beaucoup de monde, une clientèle très internationale, un grand jardin, un personnel courtois et une excellente cuisine pour un prix somme toute très acceptable. Nous rentrons à l'hôtel pour refaire nos sacs, nous quittons Bali demain matin pour Yogjakarta. Nuit encore très difficile, nous avons du mal à trouver le sommeil.

Mardi 8 août 2000 : Yogjakarta.

Lever 6h15 et petit déjeuner à 7h00. Pas exceptionnel, le petit déj, d'ailleurs, deux toasts, une confiture bizarre, des morceaux de fruits coupés auxquels nous ne touchons pas. C'est le petit déj standard que nous aurons presque partout. Je ne vous parle pas du café, si on peut appeler ce breuvage noirâtre comme cela. Nous sommes finalement assez content de quitter Kuta. Une journée est bien suffisante dans ce type d'endroit. Je hèle un taxi qui nous emmène à l'aéroport. Nous arrivons assez à l'avance. Enregistrement rapide et attente. Un boeing 737 va nous mener à Yogjakarta. Nous survolons le détroit entre Bali et l'Ile de Java, puis les cratères des volcans du sud de Java. C'est vraiment très beau. Les volcans font partie de la réputation touristique de l'Indonésie : le Bromo, le Semeru, etc... Tous peuvent faire l'objet d'excursions, souvent très matinales et un peu sportives, les cratères et leur environnement sont, parait-il, splendides. Il y a beaucoup de monde. Avec Armance, nous ne nous voyons pas partir escalader des montagnes à deux heures du matin, pour arriver au sommet au lever du soleil.

Arrivée à Yogjakarta quasiment à la même heure que Bali, puisqu'il y a une heure de décalage horaire entre les deux îles. Nous prenons un taxi à prix forfaitaire pour une adresse d'hôtel relevée dans le routard. Yogjakarta nous apparaît comme une ville importante, avec tout de même pas mal de circulation et quelques immeubles élevés (des grands hôtels pour la plupart). Bien sûr, c'est une ville de province par rapport à Jakarta, avec ses 10 millions d'habitants (sinon plus), ses gratte-ciels, ses autoroutes entrelacées, ses bidonvilles, sa vie frénétique, telle qu'elle est décrite partout. Dès le départ, nous avions décidé d'éviter Jakarta, parce que tous ceux qui y sont allés nous ont dit que cela n'avait pas d'intérêt et qu'en plus, avec les problèmes politiques actuels, il vaut mieux l'éviter. Il y eu d'ailleurs juste un attentat une semaine avant notre départ. Pour Yogjakarta, il n'y a pas véritablement d'unité urbaine. Ce n'est pas à proprement parlé une belle ville et j'en suis un peu déçu mais elle ne s'avérera pas déplaisante. Les hôtels se situent dans deux quartiers : celui de Sosro, central, et celui de Prawirotaman, plus excentré mais plus riche en choix et plus touristique. Nous préférons Sosro, plus authentique. 

Malheureusement, le losmen Bladok, que j'avais repéré, est complet. Nous nous rabattons alors, sur les conseils d'une touriste francophone, sur l'hôtel Batik Yogjakarta. Pas facile à trouver car tout au fond d'une petite venelle mais c'est une agréable surprise : un grand jardin avec des jolis bungalows, la TV même, ce qui réjouit Armance, une belle piscine, tout ceci en plein centre. Le prix est honnête, moins de 30 euros avec le petit déjeuner. On remarquera juste un petit laisser aller dans le service et l'entretien. Après avoir déposé nos sacs, nous partons vers l'artère principale de Yogja, Malioboro (à ne pas confondre avec la marque connue de cigarettes). C'est le cœur de la ville, un bon kilomètre de long. Bordée de magasins sous des arcades. Beaucoup de monde, de bruit, de voitures, de pollution, de becaks. Les becaks sont des vélos tricycles qui servent de taxi. Dur métier sans doute que conducteur de becak ; il faut pédaler dur dans les côtes, avec trois passagers à l'arrière. Évidemment, au centre, le magasin 'Matahari'. Nous déjeunons dans un restaurant en terrasse juste à côté, qui domine la rue et nous permet d'observer la vraie vie urbaine indonésienne, car à la différence de Kuta, c'est qu'ici, on vit et travaille d'autre chose que du tourisme tout de même. La fin d'après midi est consacrée à se balader encore un peu aux alentour de Malioboro et d'aller profiter de l'agréable piscine de l'hôtel, où Armance est très heureuse de nager. Le soir, nous allons dîner au Bladok, qui fait également restaurant. Repas convenable mais un peu cher et service très lent. Je ne regrette finalement pas de ne pas avoir été dans cet hôtel qui présente moins de charme que le Batik. En rentrant, tout prêt de notre hôtel, nous nous arrêtons devant une agence, 'Jaya tour', citée par le routard. Ils proposent toutes sortes d'excursions sur la région de Yogja. Comme je l'ai déjà dit, nous n'envisageons pas d'utiliser les transports en commun. Nous choisissons donc, pour tester, le lendemain après midi, l'excursion pour le temple de Borobodur. C'est le 'sunset tour' !. Nous regagnons enfin l'hôtel pour une soirée agréable et douce, avec, comme de bien entendu, nos kreteks et verres arack noyés au coca. La température est vraiment agréable. Par contre, même si l'impression de beau temps domine, le ciel est toujours encombré de nuages. La nuit est meilleure, malgré un matelas assez mauvais, notre organisme s'adaptant enfin un peu mieux au changement d'horaire.

Mercredi 9 août 2000 : Le kraton de Yogjakarta et Borobodur.

La vaste salle de restaurant en bambou de l'hôtel et le nombreux personnel dédié au service laissait prévoir un beau buffet de petit déjeuner. Hélas, il n'est guère plus riche que l'hôtel de Kuta, sauf que les toasts sont à volonté... La matinée sera consacrée à la visite du Kraton de Yogjakarta. Le Kraton est le palais du sultan. Le sultan est le gouverneur de la région centrale de Java mais son prestige dépasse largement ce territoire. Il est l'héritier des rois de Java et son rôle politique modérateur lors des événements politiques de 97 - 98 ont renforcé son aura. Il est le 10ème représentant de la dynastie, mais n'aura pas d'héritier direct puisqu'il a cinq filles. C'est son jeune frère qui lui succédera. Il dispose d'une très grande fortune. Le Kraton est un bâtiment qui date de 1756 et qui couvre un large périmètre au bout de Malioboro. Nous y allons à pied depuis l'hôtel. La distance est plus longue que prévue. Mais cela nous permet de voir toute l'activité commerciale et centrale de la ville. Nous arrivons enfin, Armance commençant à fatiguer un peu, devant une grande esplanade vide, couverte de pelouse.

Le portail du kraton de Yogja

Les bâtiments du palais se trouvent derrière. Autant le dire tout de suite, il n'y a pas grand chose à voir. On accède uniquement au hall de cérémonie, qui ne présente pas un intérêt particulier. Évidemment, des guides attendent le touriste, en forçant un peu la main.Un, parlant français, va nous guider dans les quelques espaces ouverts au public. A défaut de voir quelque chose, il sera au moins intéressant d'avoir quelques explications. Il fait ce qu'il peut dans un français assez approximatif mais est sympathique.

  La visite terminée, nous partons à la recherche du Raman Sari, ou château d'eau. Nous empruntons un ensemble de rues et de ruelles, où se trouvent de nombreux magasins et fabriques de batik. Nous passons également pas des petits marchés couverts d'alimentation. Le petit peuple qui fait ses courses. Des vieilles femmes, qui vivent de la vente de quelques fruits ou légumes. Une partie du marché est réservée à la vente des oiseaux. Nous naviguons au pifomètre, ne me retrouvant pas sur mon plan. Mais c'est l'occasion de rentrer pleinement dans les petites venelles et de voir la vie des quartiers. Nous trouvons un ancien bâtiment en ruine, qui semblait être le lieu recherché mais pas les bassins indiqués sur notre guide. En grimpant par un petit escalier, on atteint la plate-forme et cela nous permet d'avoir une vue sur l'ensemble du quartier, constitué de petites maisons enchevêtrées, construites de torchis et de bois. Nous renonçons et retournons vers le Kraton. Nous avons beaucoup marché déjà et il ne semble pas possible pour Armance de retourner à pied à l'hôtel. Nous prenons donc un becak. A trois sur le vélo, notre conducteur doit quand même souffrir, surtout dans les montées.

Après un léger repas, nous profitons avec Armance de la piscine de l'hôtel. A 16h30, nous nous rendons à l'agence pour notre 'sunset tour' à Borobodur. Comme je m'en doutais, nous sommes en fait seuls, ce qui fait que nous disposons du minibus comme d'une location de voiture, avec chauffeur et guide. Borobodur est à une quarantaine de kilomètres. Il nous faudra une bonne heure pour rejoindre le site, on ne roule pas vite en Indonésie. Quant au 'sunset', cela semble compromis, de gros nuages de pluie se profilent à l'horizon et celle-ci finit pas s'abattre violemment. Pas de veine... Bon, lorsque nous arrivons sur le site, heureusement, le temps se lève un peu. Nous stoppons sur un grand parking et nous sommes assaillis dès la sortie par de nombreux vendeurs. Nous nous y attendions. Nous achetons nos tickets et marchons dans un grand jardin pour atteindre le monument.

Vue générale de Borobodur

Borobodur est le plus grand monument bouddhique du monde. Il a été construit à la fin du 8ème siècle après JC. D'apparence, cela ressemble à une sorte de grosse vasque renversée, de couleur noire. Ceci provient de la pierre utilisée : de l'andésite, une pierre volcanique facile à sculpter. On grimpe au sommet par des escaliers repartis tout autour du monument et on atteint alors les niveaux supérieurs où sont posés des petites stupas avec des bouddhas à l'intérieur de chacune d'entre elles. Une grosse stupa couronne le monument. Beaucoup de monde encore en cette fin d'après midi. La météo s'est arrangée  et même si cela n'est pas le grand beau temps, on peut admirer la campagne et les montagnes environnantes. 

Bas relief à Borobodur

Le monument est par lui même impressionnant mais l'erreur serait de grimper à son sommet et de redescendre, ce que font, me semble-t-il, beaucoup de gens, sans s'arrêter sur les petites coursives intermédiaires, qui sont décorées de magnifiques bas reliefs. Il y a au total 6 terrasses. Nous prîmes beaucoup de temps à admirer tous ces bas reliefs, bien conservés malgré la fragilité de la pierre. 
Borobodur restera sans aucun doute un de mes meilleurs moments de l'Indonésie, par la richesse de ses sculptures et le caractère unique du lieu. Nous regagnons ensuite le véhicule, le site allant fermer, et sommes assaillis de nouveau par une multitude de vendeurs, qui mettent leur derniers espoirs de la journée en nous. Heureusement, un groupe d'Italiens hilare joue le rôle d'aimant et nous arrivons à nous échapper du piège ! Les embouteillages de Yogja nous font atteindre l'hôtel une bonne heure et demi après notre départ du site. 

Les stupas du temple de Borobodur

Il fait bien sûr déjà nuit, puisque le soleil se couche peu après 18h. le soir, nous allons dîner près de l'hôtel, dans une petite ruelle adjacente, où sont regroupés quelques restaurants pour touristes et cybercafés. Rien de bien luxueux mais une ambiance plaisante. Nous choisissons le petit restaurant 'Superman', qui propose des plats simples, bons et vraiment pas chers. Retour à l'hôtel, où Armance se fait un petit sitcom indonésien à la télé avant de dormir - on ne va pas l'en empêcher, elle a suivi toute la journée sans broncher - et nous, bien sûr, nous sirotons notre arack en fumant une kretek et en profitant de la douceur du soir.

Jeudi 10 août 2000 : Prambanan et Surakarta (Solo).

Nous nous levons à 5h30 car nous allons voir le temple de Prambanan au lever du soleil. Après un petit déjeuner improvisé, nous rejoignons l'agence pour un départ à 6h00. Aujourd'hui, il s'agit d'une location de voiture car il n'existait pas d'excursion combinant Prambanan et la ville de Solo, à 60 km de Yogja. Le véhicule est un petit minibus, avec un chauffeur et un guide parlant anglais à notre disposition. Nous paierons environ un peu plus de 30 euros pour toute la prestation. Nous quittons Yogja et arrivons sur le parking du site moins d'une demi-heure après, puisque cela n'est qu'à 17 km de la ville. Le parking est très grand ce qui en dit long sur le nombre de visiteurs en journée. Nous sommes les premiers et la caisse vient seulement d'ouvrir. Le temple de Prambanan est en fait un vaste parc avec plusieurs temples éparpillés mais seul un groupe est réellement important. Prambanan fut le sanctuaire de l'Hindouisme à Java et fut construit au 9ème siècle après JC. Il est donc quasiment contemporain de Borobodur. Les deux religions, Bouddhisme et Hindouisme, se concurrençaient à l'époque sur l'île. L'Hindouisme finit quelques siècles plus tard à vaincre mais les deux religions furent balayées par l'arrivée de l'Islam au 15ème siècle. Sur Java tout du moins. 

Le temple de Prambanan

Le temple a fait l'objet d'une restauration généralisée, ce qui présente l'avantage d'avoir reconstituer les monuments dans leur état d'origine même s'ils ont un côté un peu aprété. Il reste encore beaucoup de ruines par terre et les travaux de restauration continuent. Prambanan est un magnifique temple à visiter, particulièrement le groupe de Candi, qui est l'ensemble principal et le plus largement reconnu. Les différents monuments sont couverts de bas reliefs, avec les dieux du panthéon hindouiste : Brahma, Vishnu, Çiva, Ganesh. 
La lumière du petit matin est merveilleuse sur la pierre couleur miel et rosée et nous restons longtemps à admirer la richesse des bas reliefs. En plus, nous sommes quasiment seuls à profiter du site. Après deux heures de visite, nous regagnons le parking. Nous aurions volontiers pris un thé mais le restaurant n'est pas encore ouvert. Nous remontons dans le véhicule, direction Surakarta, ou plus communément Solo. Cette ville se trouve à 60 km de Yogja, au nord est. Solo est une ville moins importante que Yogja par la taille, mais tout aussi intéressante sur le plan culturel. 

Bas relief du temple de Prambanan

C'est ici que s'installa la dynastie de Mataram, qui y construisit son premier palais, le Kraton de Solo. Yogja n'existait pas à l'époque et se fut en fait un schisme dans la royauté qui entraîna la construction du Kraton de Yogja. Les deux Kraton se sont donc fait concurrence au cours des siècles, et on peut dire que des deux familles régnantes, c'est celle de Yogja qui a emporté la partie, car celle de Solo à fait très souvent de nombreuses erreurs dans ses choix politiques et stratégiques. La ville se présente au premier abord d'une manière beaucoup plus aérées avec de larges avenues et de la verdure.

le hall principal du Mangkunegaran Palace

Nous venons y visiter principalement les deux palais. D'abord, le Mangkunegaran Palace. Ce n'est pas le Kraton mais c'est la résidence de la famille royale, qui y vit et occupe donc une partie du palais que l'on ne peut pas visiter. Après les billets, un jeune guide nous propose une visite commentée en anglais, ce que nous acceptons. Nous traversons en premier un très grand hall de cérémonie, dont le sol est revêtu de marbre, comme les colonnes. 

Tout ceci a été édifié au 18ème siècle. Dans les bâtiments suivants, nous pouvons voir des armes, des bijoux, de la vaisselle, etc... toutes sortes d'objets d'une assez grande qualité. Également des jardins intérieurs, très bien entretenus et agréables, avec, aux murs, de nombreux portraits de toute la famille régnante, passée et actuelle. La visite se révèle être un agréable moment. Notre guide est sympathique. 

Nous reprenons ensuite notre véhicule et nous rendons au Kraton à proprement parler. Là, nous serons un peu déçu, car l'ensemble des bâtiments ne présente pas beaucoup d'intérêt et les quelques pièces aménagées en musée sont bien tristes. Les objets présentés n'ont pas beaucoup de valeur à nos yeux. Bon, il eut été inconvenant de visiter Solo sans se  rendre à son Kraton. Je précise quand même que ces bâtiments, y compris celui de Yogja, ne présentent globalement pas un intérêt architectural majeur. Il ont surtout une valeur historique. Comme il n'est pas encore tout à fait midi (nous nous sommes levés à 5h30), nous en profitons aller visiter le Radya Puspaka Museum. Tout un ensemble de petits objets divers, archéologie, ethnologie, etc. La visite est personnalisée, puisque c'est l'employé de l'accueil qui nous accompagne et commente, comme il se doit, sans doute heureux d'arrondir son salaire de la journée.

C'en est assez des visites, Armance commence à en avoir sérieusement marre. On la comprend. Nous demandons donc à notre guide de nous déposer au centre de Solo, question de profiter de l'activité commerciale et de manger. Nous nous donnons une heure et demi. Pour le repas, cela sera un... Mac Do. Armance avait bien sûr repéré le logo est nous bassinait ; nous avons eu envie de la remercier d'avoir été sympa pour toutes les visites qu'elle a supporter sans trop râler. Nous 'dégustons' donc la "qualité" made in USA légèrement teintée de sauce indonésienne : sans surprise, cela ne nous laissera pas un souvenir impérissable. Armance était surtout intéressée par le cadeau du menu enfant. Hors de prix pour un revenu moyen indonésien bien sûr. Ensuite, nous nous baladons dans la rue principale, et la surprise : nous remarquons que beaucoup de magasins sont détruits, d'édifices abîmés, avec des traces d'incendie. Ce sont les traces des événements de 98, où la population indonésienne s'en est prise aux commerçants chinois et où la famille royale de Solo a encore une fois fait preuve de faiblesse en ne jouant pas son rôle modérateur, comme le sultan de Yogja, qui lui, a réussit a calmer les esprits et éviter les troubles dans sa ville. A la vue des dégâts, l'ambiance devait être ici très chaude. Nous terminons notre visite par le centre commercial central, avec le classique magasin Matahari et tout un ensemble de boutiques assez occidentalisées.

Vers 13h30, nous regagnons le véhicule pour rejoindre Yogja. Nous avons une heure et demi de route qui nous attend, la circulation est très dense et la route pas exceptionnelle. Il nous arrive alors une petite aventure qui va nous faire flipper quelques temps. Nous avions bien sûr emporté avec nous de l'eau en bouteille et nous en buvons de temps à autres dans la voiture. C'est alors qu'à un moment, Sibylle pousse un cri. Elle s'aperçoit que nous buvons dans une bouteille qui ne nous appartient pas. Nous demandons au chauffeur d'où provient cette bouteille. Il nous répond que c'est l'eau pour le radiateur... Évidemment, nous devenons blême. Armance en a bu également. le chauffeur et le guide essaient de nous rassurer en nous expliquant qu'elle était bouillie. Nous en sommes très moyennement convaincus... Nous envisageons donc ce que nous pourrions bien chopper : amibes, typhoïde ou autres joyeusetés ! Plusieurs semaines après, nous sommes toujours en bonne santé, ce n'était donc pas trop grave ! Mais bon stress quand même.

Nous rentrons à Yogja à la mauvaise heure. A l'entrée de la ville, nous stoppons à l'hôtel Ambarrukmo, où s'est installée la Garuda. J'y reconfirme le vol pour Bali. Ensuite, ce sont des embouteillages pour rejoindre le quartier de Sosro et notre hôtel. Nous prenons congé de notre chauffeur et de notre guide. La fin de l'après midi sera calme : piscine et thé, agréablement servi à 17h00 sur la terrasse de notre bungalow. Je fais un saut au Matahari pour le ravitaillement en peanuts, arack, coca, fruits et eau. Le soir, nous profitons des magasins de Malioboro et retournons dans la petite rue des restaurants proche de notre hôtel. Nous allons au "Superman", mais cette fois-ci l'annexe, qui se trouve quelques dizaines de mètres plus loin que le restaurant principal. Presque plus agréable, car plus petit et moins fréquenté. Nous y dînons de poisson et de poulet, arrosé de Bintang, la bière commune indonésienne. Armance prend ses éternelles french fries et du yaourt au miel. C'est bon et pas cher. Retour à l'hôtel, soirée calme, nous nous reposons.

Vendredi 11 août 2000 : Imogiri et Parangtritis.

Cette nouvelle journée sera consacrée à la visite de deux sites au sud de Yogja, en partant vers l'océan. Nous nous levons plus tard aujourd'hui et après le petit déjeuner, nous rejoignons notre agence habituelle pour prendre notre moyen de transport. Il s'agit d'une excursion mais encore une fois, nous sommes seuls, ce qui revient quasiment à une location de voiture avec chauffeur. Nous quittons Yogja vers 10 heures, et nous rendons en premier dans une banlieue assez proche où se trouvent de nombreux magasins pour touristes. Pourquoi pas : nous avons le temps. Nous visitons une fabrique de bijoux en argent et après quelques démonstrations, nous faisons le tour des vitrines. Sibylle s'achète un bracelet et une petite bague pour Armance. Il y en a pour tous les goûts. Nous visitons également un magasin de marionnettes mais la qualité n'y est pas. 

Nous reprenons la route pour Imogiri, à 20 km de Yogja. Il s'agit en fait du cimetière de la dynastie des sultans de Java. Il fut édifier en 1645. C'est un lieu de pèlerinage très important. L'avantage est que cela est très authentique et peu visité des touristes. Les tombes, qui se trouvent dans des petits mausolées, sont installées sur une colline et il faut emprunter un escalier de plus de 300 marches pour y arriver. Lorsque l'on est en haut, on a droit à tout un cérémonial.


Le cimetière de Imogiris (photos interdites à l'intérieur)

On signe un registre, on retire nos vêtements pour revêtir un costume traditionnel (sarong et ceinture, torse nu pour les hommes). A 11h30 heures, les portes s'ouvrent et nous nous introduisons dans l'espace sacré, accompagné de plusieurs hommes et quelques femmes. Nous nous installons alors à l'entrée d'un petit temple où quelques religieux commencent une cérémonie, avec chants, récitations et offrandes. Tout ceci est plein de ferveur mêlée de recueillement. A la fin de cette petite cérémonie, on nous introduit par une toute petite porte à l'intérieur du mausolée et nous nous retrouvons dans une petite pièce sombre, devant le sarcophage du premier sultan de java. Encens et chants, dévotion, tout ceci est emprunt de mystère et troublant. Nous restons quelques minutes et ressortons, curieux de voir l'impatience des personnes présentes à s'introduire dans cette pièce. Armance ne comprend pas trop la cérémonie, et nous, nous sommes assez dubitatif devant une telle religiosité par rapport à un mortel. Bref, un moment particulier, un peu en dehors des sentiers battus.

Nous retournons à l'entrée du site. Il est possible de visiter les autres tombes mais nous en resterons là, ne souhaitant pas renouveler le cérémonial une seconde fois à Armance. Nous récupérons nos affaires, nous changeons et redescendons les escaliers. C'est par contre l'heure de la prière pour notre guide qui nous abandonne quelques instants pour la petite mosquée toute proche du site. Nous reprenons la route pour Parangtritis. Nous demandons au chauffeur s'il est possible de déjeuner dans les environs. Il nous arrête quelques kilomètres plus loin dans un restaurant assez présentable. Cela sent à première vue le truc à touriste, mais en fait, ce n'est pas le cas. Planté en pleine campagne, sur une route assez peu fréquentée, c'est un endroit plutôt réservé aux Indonésiens, qui ont quelques moyens. On y mange très bien, du poisson particulièrement, et pour un prix vraiment doux. De souvenir, la nourriture était apportée sans couvert, ce qui montre bien que le lieu n'était pas trop occidentalisé.

Nous continuons pour atteindre la plage de Parangtritis une petite heure après. La route qui y mène est vraiment belle, une campagne très verte, des palmiers, des rizières, des petits villages. Parangtritis est une immense plage, avec de nombreuses petites boutiques très rudimentaires. C'est un peu Yogja beach et surtout réservé aux Indonésiens. Il y a, paraît-il beaucoup de monde le week-end, mais la semaine, c'est vide. La plage est d'un sable plutôt gris et la mer est extrêmement dangereuse. la puissance et la taille des rouleaux n'incite pas à s'y baigner. Une pancarte indique le nombre de morts par année... Il y a beaucoup de vent et une petite brume de vapeur sature l'atmosphère. Des ânes avec leur petite carriole attendent le touriste mais sans beaucoup de succès car il n'y a pratiquement personne. Cette plage a quelque chose d'un peu triste, mais je ne l'ai pas trouvée complètement désagréable. Une fois par an, lors de l'anniversaire du sultan, toute la famille royale arrive ici en grande pompe et abandonne à la mer, ici divinisée, toutes sortes d'offrandes. Le peuple se jette alors à l'eau pour les récupérer et les conserver comme talismans sacrés et protecteurs.

C'est la fin d'après midi, nous quittons alors Parangtritis pour rejoindre Yogja. Toujours la circulation intense dans la ville à cette heure. Nous avions penser voir un spectacle de danses traditionnelles le soir mais n'en avons guère le courage. Nous ferons donc un peu de lèche vitrine (si on peut dire, car il n'y a pas vraiment de vitrine...) avant de nous rendre au restaurant 'Superman', ou plutôt son annexe. Là, à la table derrière nous, une Suisse avec son petit garçon de cinq ans, Arthur, copain de jeux de quelques instants pour Armance. Nous les retrouverons plus tard dans notre voyage. Soirée tranquille à l'hôtel que je règle par CB, quatre nuits tout de même. Demain, nous nous levons tôt.

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